Je suis Charlie: Comment expliquer à nos enfants l’inexplicable ?

07844089-photo-je-suis-charlieA la sortie du sport à 16h30, il y avait quelques parents qui attendaient leurs enfants. Nous étions tous silencieux, échangeant des regards inquiets. Nous n’avions pas besoin de parler pour partager notre tristesse et notre émotion.

Les enfants sont sortis du sport et ont brisé le silence pour nous parler de ce qu’il s’était passé aujourd’hui. Les animateurs leur avaient expliqué très brièvement l’attentat et ils essayaient de nous expliquer avec leurs mots ce que signifiait un attentat tout en souriant. Des petits sourires pour masquer leur incompréhension.

A la maison, nous en avons discuté à nouveau, avec des mots assez simples, sans rentrer dans les détails. Nous parlions chacun notre tour avec leur père, pour essayer d’expliquer à nos enfants l’inexplicable. Ils n’ont pas posé trop de questions, ils avaient compris, et sont passés à autre chose. Ils n’en ont pas reparlé de la soirée…

Little Boy, malade, s’est endormi assez vite. Nous avons couché Little girl plus tard. Elle m’a demandé si je pouvais rester un peu avec elle, j’ai souri, je n’ai pas vraiment réfléchi, et lui ai juste répondu qu’il était déjà tard, et qu’il fallait que j’arrive à calmer son petit frère.

Une heure plus tard, alors que nous pensions que tout le monde dormait enfin, Little girl revient dans le salon, des larmes coulaient sur ses joues, elle était pale :

– Je n’arrive pas à dormir, j’ai peur. J’ai peur de…
Silence…
-De quoi as-tu peur ?

Les mots se mélangeaient. Elle avait peur de beaucoup de choses :

Peur de ce qu’il s’était passé aujourd’hui, peur pour ses amis qui devaient ce jour là rentrer tout seul de l’école, mais qui n’en avaient plus le droit à cause de l’affiche jaune devant l’école. Comment allaient-ils rentrer ?

Peur aussi de la mort, peur qu’ils recommencent, et surtout peur qu’ils viennent dans notre maison ou à l’école.
Peur de tout.

Tellement d’inquiétude et d’incompréhension dans sa voix nous a donné la chair de poule.

A nouveau, nous avons « essayé » de lui expliquer ce qu’il s’était passé, que les « méchants » allaient très vite être trouvés.

Mais, au final, peut-on vraiment expliquer l’inexplicable ? Je ne crois pas. On peut juste rassurer nos enfants, leur dire que ces gens sont des fous, qu’il ne faut pas avoir peur, car si on a peur les fous et les méchants auront gagné. Expliquer ce n’est pas excuser, expliquer, ce n’est pas mentir. Expliquer, c’est donner les raisons et faire comprendre ce qui peut amener des gens à de telles extrémités. Mais quand, soi-même, on n’arrive pas à comprendre ou à rationaliser ce genre de comportement, il devient difficile d’expliquer…

Alors, à cette heure tardive, nous n’avons pas parlé de religion, de liberté d’expression ou de dessins, nous avons surtout voulu la rassurer : nous avons donc discuté des rassemblements qui avaient lieu un peu partout en ce moment, des témoignages de solidarité à travers le monde, de l’union et de la solidarité. Nous lui avons expliqué avec des mots simples que nous devions tous nous unir pour ne pas avoir peur, et que nous, adultes, allions toujours protéger nos enfants.

Que le plus important en ce moment était la solidarité et que demain, à l’école, il y aurait surement une minute de silence, et qu’il fallait que tous les enfants y participent.  Nous sommes tous Charlie.

Cette discussion l’a rassurée, elle a fini par s’endormir.

Nous en parlerons à nouveau ce soir.

Et vous, comment en avez-vous parlé à vos enfants ?

Le Petit Quotidien nous aide à en parler à nous enfants et propose une édition spéciale à télécharger.